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merci jeôme

Interview
1 Commentaire Musique | 26 Février 2011 | Mise à jour le 27 Février 2011

Johnny, à la vie, à l'amour

Un mois avant la sortie de son nouvel album, Jamais seul, le chanteur nous a ouvert la porte de son havre californien pour parler rock'n'roll et autres plaisirs.


Vous avez toujours su prendre appui sur les talents du moment: Berger, Goldman. Qu’est-ce qui rend -M- unique?
Déjà comme guitariste, il est ahurissant. Dans les années 1970, il aurait été le challenger d’un Jimmy Page. Sur ce disque, il est allé plus loin encore dans la virtuosité. C’est mon boulot de pousser à se dépasser les artistes dont je m’entoure.

Vous n’aviez pas prévu de refaire de disque si tôt.
Mais quand je suis revenu à la vie, j’ai eu besoin de réattaquer tout de suite. Pour conjurer le sort et un tas d’autres choses. Laeticia m’avait dit: "Tu adores le jeu de guitare de -M-, pourquoi tu ne lui proposes pas une collaboration?" Il était le partenaire idéal à ce moment-là, parce qu’il travaille dans la spontanéité.

Et vous avez aimé ça...
Ça m’a rappelé mes débuts. On a enregistré sur des magnétos à bandes trois pouces pour retrouver le son d’époque. Je n’étais pas le chanteur habituel, qui arrivait à la fin de la session pour placer sa voix. J’ai inspiré à la voix des arrangements qu’ensuite Matthieu et Maxime Nucci (du groupe Yodelice) ont transposés pour quatuor à cordes, sur la chanson La Douceur de vivre.

«L'intubation avait touché les cordes vocales, je pouvais à peine sortir un son.»
Vous reprenez Tanagra, écrite pour -M- par Brigitte Fontaine.
Histoire étonnante. J’ai découvert ce titre en arrivant en retard au concert de Matthieu. Je croyais qu’il était plutôt un chanteur de variété pop et je l’entends jouer ce blues! En coulisses, je lui dis: "Si on travaille ensemble, j’aimerais reprendre Tanagra". Là, il me répond: "Cette chanson te revient de droit. Brigitte l’avait écrite pour toi il y a des années, sans jamais oser te l’envoyer."

En septembre, vous aviez confié dans le JDD, à votre ami l’écrivain Daniel Rondeau combien vous aviez craint de perdre votre voix. A l’écoute du disque, elle est bien là.
Une de mes plus grosses angoisses. L’intubation avait touché les cordes vocales, je pouvais à peine sortir un son, on aurait dit Donald Duck! Et elle est revenue. Sans rééducation, sans coach.

On ne vous voit boire que du café, du cola…
L’alcool est sorti de ma vie. Je ne touche plus une goutte depuis des mois. Prochaine étape: arrêter la cigarette.

Vous fumez moins?
J’essaie… J’utilise des patchs, le soir surtout, quand on sort. J’ai pris conscience que c’était une drogue à part entière.

Il y a un mois, vous êtes encore passé sur une table d’opération.
Oh, rien de grave, on m’a changé la prothèse de hanche qui datait de vingt-neuf ans alors que ça se change plutôt tous les douze ou treize ans.

Vous avez eu peur?
Evidemment, j’ai failli y passer l’an dernier. Alors au moment de l’anesthésie, j’avais une… appréhension. Qui ne l’aurait pas eue! Tout ce que Laeticia m’a raconté sur mon coma a provoqué une peur rétrospective terrible. Songez que quand elle demandait aux médecins de lui assurer que j’allais m’en sortir, ils lui répondaient: "Dieu seul le sait." J’ai très mal vécu tout ça. Le pire est de savoir que les médecins voulaient faire signer à ma femme le papier qui l’aurait autorisée à me "débrancher" en cas de coma dépassé…

«L'alcool est sorti de ma vie. Je ne touche plus une goutte depuis des mois.»
Vous avez bien gagné le droit de chanter Vous n’aurez pas ma peau sur le disque!
Clin d’œil à cette épreuve terrible!

En décembre, vous avez regoûté à la scène, le temps d’un duo avec -M- à Bercy.
Je lui en suis reconnaissant. Je doutais encore un peu de moi. Mais le public m’a offert un tel accueil que la confiance est revenue.

On vous a dit bouleversé par les témoignages de sympathie.
Si je parle aujourd’hui, c’est aussi pour envoyer des signes rassurants à tous ces gens. Je me force un peu, parce que je suis pudique, mais les Français ont été plus nombreux que je n’imaginais à me dire leur amitié. Ça m’a fait du bien.

La bonne nouvelle concernant ce "tour des adieux", c’est que, justement, il ne sera pas le dernier.
Tout ce temps où j’ai essayé de me sortir de cette peur, de cette torpeur, j’ai accumulé une force intérieure nouvelle considérable. Et commencé à me dire: "Mais pourquoi m’arrêter? C’est ma vie!"

A quoi ressemblera le Tour 2012?
Le groupe sera réduit pour garder l’esprit rock du CD, avec -M- à la direction musicale et Olivier Dahan à la mise en scène. Il avait fait du beau travail sur Mozart, l’opéra rock et je l’admire comme cinéaste (La Môme).

Vous rajeunissez les cadres, après avoir changé de producteur.
Je me suis séparé de Jean-Claude Camus parce qu’il ne s’est pas bien conduit ni avec moi, ni avec ma famille, ni avec le public. Combien de spectacles annulés sommairement au mépris des gens! C’est surtout quelqu’un qui a fait dire des choses fausses à ma femme, notamment sur le Dr Delajoux. Pour moi, Jean-Claude Camus n’existe plus, il finira seul, ce sera sa pire punition.

Avant la tournée, il y aura le théâtre en septembre.
Tennessee Williams, Le Paradis sur terre. Pas facile, beaucoup de texte, je suis un peu désorienté encore, mais Bernard Murat met en scène, ça rassure, parce qu’on n’a pas de prompteur au théâtre.

Mais des oreillettes!
Surtout pas, ça empêche de jouer naturellement.

De par votre fatalisme, nouveau, vous faites penser au héros malheureux du film 127 Heures: l’histoire d’un casse-cou qui pensait qu’aimer la vie, c’était la provoquer, avant d’admettre qu’il y avait mieux à faire en la respectant.
Je n’ai pas vu le film, mais c’est un peu mon cas. Oui, quand tout va bien, on n’a pas conscience de ce qu’on peut perdre, on pense que rien ne peut nous arriver…

Ce week-end, les oscars. Votre favori?
Le Discours d’un roi. J’ai invité quelques potes à suivre la soirée dans notre nouvelle salle de ciné 18 places: Mickey Rourke, Gad Elmaleh, David Hunger, mon agent, et puis Ben Affleck et Tom Hanks qui viendront en voisins.

Merci